EDITORIAL :
C‘est avec grand plaisir que nous avons l’honneur de présenter le présent numéro de notre revue avec la seconde partie du dossier consacré au Judaïsme d’Algérie. Le premier volet de ce dossier, paru dans notre numéro 76, portait sur une description générale de la présence juive en Afrique du Nord depuis l’Antiquité. Profitant de ce panorama, nous nous sommes penchés sur l’origine de cette présence, complétant ainsi une lacune sur le sujet : nous avions déjà tenté de dégager les grandes lignes du judaïsme tunisien, mais en survolant de manière un peu superficielle les données relatives à ses origines. Cette lacune a été comblée dans les pages du début de ce dossier publié dans notre n 76, lorsque nous avons poursuivi notre promenade dans l’Algérie voisine, décrivant l’histoire de la communauté juive qui s’est développée dans ce pays jusqu’à son exode définitif. Le lecteur qui n’a pas eu l’occasion de faire connaissance avec ce dossier s’y référera utilement. Il restait à parler des diverses grandes communautés algériennes — et c’est ce que nous proposons dans le présent numéro.
On aurait pu croire que l’Algérie juive avait perdu également l’ensemble de ses repères traditionnels. Nous avons voulu montrer qu’il n’en était rien, et que cette partie de l’Afrique du Nord a vu un éclat spirituel extraordinairement vivace. Il est vrai qu’il subsiste ici, en fin de compte, une grande question. On a vu se maintenir en Algérie une très forte tradition rabbinique, et ce malgré la décadence désastreuse observée un peu partout. Un tel contraste n’a jamais été observé ailleurs, où la décadence du niveau moral et religieux d’une communauté est en principe suivie d’un relachement des cadres qui perdent rapidement leur propre conscience religieuse. On aurait pu, en Algérie, assister au même phénomène, encouragé par l’arrivée de rabbins originaires de la métropole décidés à aider à l’acculturation française du judaïsme autochtone et à l’abandon des traditions locales au profit d’une religion peut-être généreuse et universelle, mais dangereuse pour l’avenir du judaïsme fidèle à son passé, ainsi que l’a prouvé l’expérience. Malgré tout cela, les rabbanim ont réussi à préserver un niveau toranique remarquable, sans que — il nous faut l’avouer — les raisons de ce sauvetage nous soient perceptibles.
Rav H. Kahn
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