Le mois d’Adar
un parallèle entre le mois d’Adar et l’actualité s’impose de lui-même: quelle différence entre les menaces et les décrets pris par Haman en son temps, le Premier Ministre d’Assuérus, à Suze, et celles proférées de nos jours par Ahmadinejad contre notre peuple ? Il s’agit du même discours, de la même volonté de détruire tout le peuple juif.
Haman était officiellement un descendant de ‘Amaleq, disent nos Sages, mais Ahmadinejad ? Il faut au moins reconnaître qu’il souffre d’un syndrome amalécite de typologie classique : il est prêt à amener son propre peuple à la catastrophe, à risquer finalement une attaque généralisée des Nations, ou au moins des Etats-Unis, ou peut-être d’Israël, il met les Iraniens dans une situation dramatique sur le plan économique, il dilapide tout l’argent du pétrole pour fabriquer une bombe atomique et armer le ‘Hezbollah et quelques autres organismes terroristes de la région …
Cette conduite n’est pas sans rappeler celle d’un autre peuple, qui, voici quelques décennies, s’est conduit de la même manière : les nazis ont donné la préférence à l’immense appareil de destruction des Juifs plutôt que de se tourner vers les divers fronts sur lesquels leur pays devait alors se défendre …
Or c’est exactement ce qu’a fait ‘Amaleq en son temps : ce peuple savait que la « baignoire était brûlante» (Tan’houma Ki Tétsé), mais n’a pas hésité à s’y plonger, afin de la refroidir – car pour ‘Amaleq, et pour ses descendants, le but principal de leur vie est de s’en prendre au peuple juif et à tout ce qu’il représente dans Je monde, son message de spiritualité et de morale, de conscience et d’humanisme, quitte à se suicider pour défendre leur propre anti-spiritualité ! « Ils vous ont poursuivis comme le font les abeilles » (Devarim!Deutéronome 1,44), Rachi expliquant cette comparaison : « De même que cette abeille, quand elle pique un homme, meurt de suite, de même eux, dès qu’ils vous frappaient, mouraient sur le champ … » Ils le savaient, et pourtant ils insistaient …
Cette conduite d’Ahmadinejad est donc intéressante, parce qu’elle nous permet de supposer que son essence est amalécite.
Peut-être qu’avec le message de Pourim, pouvons nous dégager aussi une ligne de conduite nous concernant.
Il est clair que des menaces de cet ordre ont une intention, une raison d’être. Même quand un fou se lève contre nous et parle de nous anéantir, on ne peut pas l’ignorer, sous prétexte que cette personne est dérangée ! Et si quelqu’un a tendance à le faire, il faudra le renvoyer à l’expérience dramatique du peuple juif avec ce genre de personnage, ainsi que nous l’avons vécu durant la Shoah ! Il est probable qu’Hitler était dérangé d’esprit, mais cela ne l’a pas empêché de réaliser tout ce qu’il avait projeté.
Selon rav El’hanan Wasserman, nous devons réfléchir au message spirituel, et non point le rejeter avec dédain. Quelque chose nous est reproché, et à nous de le comprendre.
Malheureusement, nous n’avons pas de prophète qui veuille bien nous ouvrir les yeux et nous expliquer ce qu’il faut améliorer dans notre conduite.
A Pourim, comme nous l’ont appris nos Sages, le problème « amalécite » classique était, une fois de plus, un relâchement de la conduite de notre peuple. Après la question « Est-ce que D. est parmi nous ? » de la période du désert (Chemoth/Exode 17,7), les enfants d’Israël se sont, à leur tour, détournés des instructions de l’un de leurs dirigeants, Mordekhaï, pour en faire à leur guise, et profiter du repas offert par A’hachvéroch (Meguila 12b). Cette velléité était évidemment celle du judaïsme tout entier avant la Shoah, ainsi que nous allons le voir dans le présent Grand Dossier, quand 90% du peuple juif avait tourné casaque.
Qu’en est-il de nos jours? Le grand mérite de notre génération est bien entendu son retour en masse à la pratique, à un niveau inégalé, si ce n’est du temps de Ezra et de Ne’hémia ! C’est le mérite de centaines de milliers de personnes qui forment de nos jours la communauté pratiquante, et qui résistent aux facilités de la vie occidentale et à ses attraits si bas.
Mais il est clair qu’il nous reste encore beaucoup de chemin à faire, nous devons nous adresser à autrui, nous devons faire preuve de respect tout en tentant de montrer les beautés de la Tora, et surtout nous renforcer dans l’étude de la Tora et la pratique des mitswoth, et transmettre à nos enfants nos valeurs et notre dévouement pour cette loi que l’Eternel nous a accordée – « Et tu l’étudieras de jour et de nuit» …
Un article du rav Nathan Catz, dans le présent numéro, montre de plus l’existence de nouvelles épreuves, même à l’intérieur de la communauté, menant justement vers une remise en question de la place des dirigeants du monde de la Tora et de la validité de leur compréhension. Reviendrions-nous à la case départ, celle du peuple juif à Suze ?
Sans parler de ces groupes réformés, qui prennent de plus en plus de place et de légitimité dans notre communauté, et qui, en même temps, galvaudent la morale au su de la France tout entière. Peut-être que pour certaines personnes dans le désarroi, ces voies permettent un retour en douceur vers la pratique, mais nul n’a le droit d’ignorer l’opposition la plus flagrante à laquelle ces groupes ont eu droit, de la part de l’ensemble des rabbanim de tous horizons, tant sefarades qu’achkeI).azes ! Le rav Méïr Shapira de Lublin, dans nos présentes colonnes, trace du reste un tableau fulgurant de ce à quoi a pu aboutir une communauté qui a suivi ces errances, celle de Prague, face à celle de Presbourg, qui, dirigée par le ‘Hatham Sofer, s’est opposée avec vigueur à ces réformes honteuses, et a de la sorte su conserver tout son dynamisme et toute son essence.
Mais Pourim, c’est avant tout la joie : c’est la date à laquelle nos ancêtres ont su réparer leurs erreurs d’antan, et revenir à la Tora, de manière entière, sans hésitations ni échappatoires ! « Ils l’ont à nouveau reçue [la Tora] du temps d’Assuérus ! » (Cliabbath 88a).
Rav H. Kahn
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