Le miracle de ce Hannouca
Hannouca est le temps des miracles, et l’impact de l’évènement plus de deux fois millénaire reste toujours réel. Est-ce de la sorte que nous devons considérer les événements qui se sont déroulés en France le dimanche, jour de l’allumage de la 7e bougie de ‘Hannouca, avec la relative défaite de l’extrême-droite ? C’est dans le fond difficile à dire : ce parti n’a pas hésité, sous la direction de Le Pen père, à pénétrer dans ce marécage fangeux de l’antisémitisme ; mais les temps ont changé, et la fille du précédent a tenté de blanchir le parti et d’abandonner cette mauvaise disposition à notre égard – tout en conservant une opposition farouche à « l’invasion musulmane » en France, et c’est ce qui lui a donné sa force au premier tour des élections. Il n’est pas facile de décider si le FN allait savoir se maintenir sur cette position – contre les Musulmans, mais peu opposé aux Juifs –, ou si finalement, un glissement risquait de se produire, que D’ nous en protège – et Il nous en a donc protégés ! Pour l’instant – puisqu’en termes de nombre de voix, le FN s’est très fortement renforcé. Or il est vrai que sur le plan des relations avec le pouvoir, la présence d’un tel groupe dans les instances dirigeantes du pays aurait pu probablement gêner tout ce qui concerne la bonne gestion des écoles juives et des autres affaires dépendant des responsables publics. Quiconque rencontre des questions de cet ordre sait pertinemment que, par exemple, la présence de « Verts » à divers postes-clés peut dangereusement entraver toute chance de trouver une oreille attentive aux besoins de notre communauté. La communauté juive, donc, peut voir dans le sursaut, au dernier moment, des électeurs un élément important pour la vie des Juifs en douce terre de France. De fait, l’inquiétude présente depuis quelque temps dans les rangs de notre communauté va plus que probablement se calmer, l’avenir semblant se profiler d’une meilleure manière. Et ce, d’autant plus que la gauche, qui n’a vraiment pas favorisé le développement économique du pays ces dernières années, paraît elle aussi s’approcher de la fin de son mandat
Une remarque s’impose tout de même : sans nul doute, l’éventualité de l’accès du FN au pouvoir était inquiétante. Cependant, fallait-il le crier sur les toits ? Certains l’ont fait. Ils ont sans doute oublié que, dans le temps, quand des Juifs américains ont décidé de lancer un boycott contre l’Allemagne, Hitler est rentré dans une fureur noire, et on pense que c’était l’un des éléments qui a engendré sa décision d’appliquer la solution finale… Certes, tout est décidé en Haut Lieu, mais nous n’avons pas à provoquer l’un ou l’autre, mais à nous conduire de manière intelligente, avisée et prudente, et surtout modeste. Nos Sages (Beréchith Rabba 75,3) ont accolé à notre ancêtre Ya’aqov, dans son attitude envers ‘Essaw, le verset suivant (Michlé/Proverbes 26,17) : « Saisir le chien par les oreilles » – « Cette conduite est à comparer au cas d’un brigand endormi à un carrefour. Un passant se permit de le réveiller : « Réveille-toi, il y a danger à dormir ici ». Il se leva, et se mit à le frapper. Le passant lui dit : « Mais je t’ai sauvé ! » Le brigand lui répondit : « Je dormais, et tu m’as réveillé ! » De même, le Saint béni soit-Il a-t-Il dit à Ya’aqov : « ‘Essaw allait sur son chemin, et toi, tu lui as envoyé des gens pour lui dire : ‘Voici ce que dit ton serviteur, Ya’aqov…' ». » Ce Midrach prouve la lucidité et l’esprit de critique remarquables de nos Sages. Il est réellement à méditer. Il nous concerne aussi dans les présentes circonstances : il faut parfois savoir se mettre de côté et garder le silence… ●
L’importance du Beth Din
Dans votre numéro 189, vous avez parlé de l’importance du Beth Din pour le peuple juif. Baroukh Hachem, de nos jours, la plupart des communautés de stricte observance, comme on appelait cela dans le temps, comprennent comme obligatoire, pour la bonne santé toranique de leur regroupement, la présence d’une telle institution à leurs côtés. A dire vrai, il en va de même pour les grandes communautés consistoriales de province – je pense à Marseille, Lyon et Strasbourg. Leurs dayanim sont même des personnalités de tout premier niveau. Là où votre critique devient percutante, c’est quand on fait le tour de la ville de Paris – qui regroupe, avec ses banlieues, 60% du judaïsme français. Là, avec un Beth Din du Consistoire, qui n’a actuellement pas de dayan à sa tête (!), effectivement, la situation est inquiétante. Auparavant, on pouvait encore trouver des dayanim haute stature dans ce Beth Din, qui avaient quelque influence sur les initiatives de la direction civile de la communauté, mais depuis la mise en retraite du dayan Yirmiyahou Cohen ce n’est plus le cas ! Ceci paraît d’autant plus affligeant que diverses manoeuvres se font jour, visant à regrouper sous la tutelle d’un président unique, et d’un seul Grand rabbin, l’ensemble des institutions consistoriales de la région. Après cela, on viendra pleurer que le public abandonne cette institution…
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